Alors que l’intelligence artificielle s’invite dans tous les métiers, la justice rappelle une évidence: son déploiement ne peut se faire sans associer les représentants du personnel. La décision récente du tribunal judiciaire de Paris, dans l’affaire France Télévisions, a suspendu l’utilisation d’un outil d’IA faute de consultation du CSE. Une jurisprudence qui change la donne et confirme que l’IA n’est pas seulement un enjeu technologique mais aussi un sujet central de gouvernance sociale.
Un enjeu stratégique et organisationnel
La diffusion progressive de l’IA, en particulier de systèmes d’IA Générative dans des environnements tertiaires, est susceptible de transformer profondément lles pratiques de travail. L’IA automatise certaines tâches, fait émerger de nouveaux besoins compétences, peut entraîner des réorganisations voire des réductions d’effectifs. Elle peut agir sur les facteurs de qualité de vie et des conditions de travail, l’équilibre des collectifs et le rapport au management.
Un cadre juridique qui s’impose
Le Code du travail encadre déjà l’introduction de nouvelles technologies. L’article L.2312-8 impose la consultation du CSE en cas de projet susceptible d’affecter l’organisation, la gestion ou la marche générale de l’entreprise. Les tribunaux de Nanterre et de Créteil avaient ouvert la voie cette année en jugeant qu’une technologie telle que l’IA Générative justifie une expertise, et qu’on ne peut pas postuler l’absence d’effet sur les conditions de travail. L’affaire France Télévisions va plus loin : elle impose la consultation préalable même pour une phase pilote, rejetant l’argument selon lequel « on ne sait pas encore comment l’outil sera utilisé ».
Le risque juridique devient tangible pour toute entreprise qui engagerait des tests ou expérimentations sans consulter ses représentants du personnel. En pratique, la question de savoir à quelle stade de la conception du projet faut-il le faire restera sans doute source d’incertitude, de même que le caractère “nouveau” d’une application IA.
Vers un dialogue social renouvelé
L’IA Générative marque une rupture par rapport aux révolutions industrielles ou informatiques passées, notamment parce que les innovations et les fonctionnalités s’y déploient en continu. Le dialogue social devrait donc évoluer et devenir plus technologique, , anticipatif et plus permanent Mais les contraintes formelles de la lourde mécanique de l’information-consultation en CSE ne sont pas forcément les plus adaptées.
Pourtant, un dialogue social bien mené peut aussi renforcer à améliorer les projets d’IA sur plusieurs axes : analyser les impacts sur l’emploi, les compétences, la santé ou l’environnement ; intégrer les principes prévention des risques professionnels dans la conduite de projet, notamment en instruisant de manière régulière les effets sur la charge de travail ; garantir la transparence et la compréhension des algorithmes ; activer le droit d’alerte en cas de dérives. Pour les exercer pleinement, les représentants du personnel doivent disposer d’une information claire, de moyens d’expertise indépendants et de formations adaptées aux enjeux techniques, juridiques et éthiques du sujet.
Une opportunité de gouvernance partagée
Loin d’être un frein, ce renforcement du dialogue social peut devenir un atout stratégique. Il sécurise les projets, réduit les résistances et favorise l’adhésion des salariés. Plusieurs pistes émergent : systématiser les études d’impact avant tout déploiement, élaborer des chartes éthiques internes, instaurer un dialogue technologique participatif
Expertise et accompagnement : un levier pour réussir
Dans ce contexte, l’accompagnement par des experts devient déterminant. Plein Sens, spécialisé depuis quinze ans dans l’analyse d’impacts organisationnels et sociaux, intervient aux côtés des entreprises pour sécuriser leurs projets de transformation. Qu’il s’agisse d’IA ou d’autres innovations, l’enjeu est d’évaluer concrètement les effets sur les métiers et de préparer un déploiement serein, accepté et maîtrisé par les équipes. Pour les directions, cette démarche constitue non seulement une garantie de conformité juridique, mais aussi un moyen de faciliter la relation avec leur CSE et de renforcer l’adhésion des salariés.